L’IA dans le marketing : copilote ou usurpateur ?

Un robot est assis à côté d'un travailleur dans un open space

En quelques mois seulement, l’IA – et sa puissance générative – est apparue au monde, tout d’abord en juillet 2022 avec Midjourney pour créer des images, puis, en novembre dernier avec ChatGPT, pour concevoir du texte. Après une période d’enchantement, une angoisse est née, comme pour toutes les révolutions que l’on ne comprend pas : l’IA va-t-elle remplacer l’homme ? et a fortiori les créateurs de contenu (graphistes, rédacteurs SEO, etc.) ? Dans cet article, nous allons donner des exemples de créations et des raisons de ne pas mettre tout de suite l’IA au bûcher pour acte de sorcellerie.

Générer des images inédites et contextuelles

Les générateurs d’image, tels que Midjourney, Stable Diffusion ou DALL·E, permettent tout d’abord de se passer des banques d’images qui proposent des illustrations utilisées à l’infini sur tous nos sites ou supports de diffusion. En outre, ces dernières ne correspondent jamais à 100 % à nos attentes par rapport à la charte graphique de la marque ou aux éléments présents, qui doivent ou non apparaître. Par exemple, on peut avoir besoin de la photographie d’une cuisine affichant une corbeille à fruits ou d’un bar sans alcool, ce qui peut être compliqué à trouver. La génération d’images permet donc de créer rapidement et simplement l’image dont on a exactement besoin, en respectant les critères spécifiques au secteur d’activité de la marque.

Il est également possible de créer des variations d’image pour mettre un produit dans un contexte, comme les équipes d’Ogilvy l’ont fait pour une marque de pneu à titre expérimental.

Capture d'écran d'un pneu mis en situation grâce à l'IA

Dans cet exemple, un arrière-plan a été généré par IA pour mettre le pneu en situation, en intégrant l’ombre et les reflets afin de rendre le résultat le plus naturel possible. Cette fonctionnalité est idéale pour des publications sur les réseaux sociaux qui nécessitent différentes déclinaisons.

Les variations peuvent être davantage contrôlées grâce à la technologie ControlNET, apparu il y a seulement trois mois. Elle permet à l’IA de générer une image à partir d’une autre. Vous contrôlez l’image de départ de la génération d’image pour créer un cadre ou adapter un logo, par exemple.

Capture d'écran montrant le fonctionnement de ControlNET

© fofrAI

Développer l’inclusion

Avec la même technologie ControlNET, il est possible, à partir d’une seule image, de développer des variations pour rendre une campagne publicitaire plus inclusive ou adaptée à vos différents marchés.

Capture d'écran de ControlNET pour montrer qu'il peut créer des variations humaines

© Actualité Houssenia Writing

La position et l’expression du modèle d’origine ont été conservées par l’IA. Bien sûr, cela fonctionne aussi pour la vidéo.

S’ouvrir à de nouveaux marchés

Pour les vidéos, en combinant plusieurs technologies, il est possible de proposer une même vidéo en plusieurs langues. Une première IA analyse la qualité sonore, une autre récupère le texte, une autre le traduit dans la langue souhaitée, une autre vocalise le texte avec la voix d’origine et enfin une dernière IA synchronise les lèvres avec les paroles. Le résultat est bluffant.

Repousser les limites de la créativité

En permettant d’obtenir instantanément les illustrations désirées, les créatifs peuvent réemployer le temps gagné pour multiplier les tentatives et repousser les limites de la créativité, en respectant le temps imparti.

De même, comme l’IA ne part pas de la réalité pour générer ses créations, elle peut être source d’originalité. Se fondant sur des milliards d’images, elle permet de ne pas partir d’une page blanche dans sa réflexion et propose des résultats auxquels on n’aurait pas pensé. Chaque raffinement d’invite (requête générant une sélection d’images) poussera ensuite le concept et la réflexion plus loin.

Elle peut aussi générer des images absolument impossible à créer dans la réalité ou nécessitant des heures de travail avec un graphiste. C’est par exemple le cas pour cette image qui met en scène un chat sortant d’un arbre en chocolat obtenue en quelques secondes sur Bing Image Creator :

chat sortant d'un arbre en chocolat

L’IA peut aussi se mettre au service de la création pour s’assurer que ses idées sont bien au service du produit, telle que cette IA qui imite l’œil humain pour hiérarchiser les informations sur un affichage.

Publicité sur un abribus avec la technologie eye tracking

© Attention Insight

Créer du contenu SEO

Bien sûr, l’IA peut se mettre au service du SEO. ChatGPT peut générer des textes pour nourrir votre site internet ou vos fiches produits. Attention cependant : utiliser ChatGPT pour faire du « remplissage » est contre-productif, car Google dispose lui-même de technologies qui évaluent la qualité des pages web pour son utilisateur final en fonction de ses critères : E-E-A-T (expérience, expertise, autorité et confiance). Pour garantir un bon référencement de votre contenu, le texte généré par votre IA préférée doit être :

  • complété pour intégrer des éléments que seul l’annonceur maîtrise, afin de se démarquer de la concurrence et de démontrer son expérience et expertise ;
  • relu pour adapter le contenu à la cible et correspondre au ton de la marque que, par essence, l’IA ne connaît pas ;
  • validé par des spécialistes du sujet concerné, car l’IA a tendance à intégrer des erreurs.

En ce sens, le texte généré par l’IA permet de ne pas partir d’une page blanche et d’inclure des angles auquel on n’aurait pas forcément pensé de prime abord. Il permet aussi d’être source de proposition pour des titres impactants à améliorer ou de valider la cohérence d’un titre et d’un texte. Chez Keyade, nous utilisons beaucoup cette fonctionnalité pour des supports marketing.

Mais le SEO ne se limite pas à créer du contenu. Une importante part est technique. En cela l’IA permet :

  • d’analyser des quantités de données provenant de diverses sources pour les interpréter et les synthétiser ;
  • de fournir des recommandations personnalisées et inclure des suggestions pour optimiser les éléments de SEO ;
  • d’automatiser les tâches répétitives et consommatrices de temps pour se concentrer sur des stratégies SEO et de nouvelles opportunités ;
  • d’orienter les stratégies de création de contenus et construire un brief plus pertinent et des contenus plus engageants ;
  • de s’adapter aux changements des algorithmes et du comportement des utilisateurs.

Le temps dégagé permet de se focaliser sur les tâches à vraie valeur ajoutée et de s’adapter aux core updates réguliers.

Une intelligence sans limite… nourrie aux biais bien humains

Il faut prendre le contenu généré avec des pincettes. Bien sûr, elle a tendance aujourd’hui à se tromper dans ses réponses. La vérification des sources est donc essentielle. Mais l’IA s’entraînant sur du contenu généré par des humains, il compte nombre de biais, notamment en matière de représentation des personnes racisées et de genre. En effet, si vous demandez à une IA de présenter un CEO, vous aurez de fortes chances de disposer aujourd’hui d’image d’un homme jeune et blanc.

capture d'écran de Bing Image Creator pour montrer les biais humains

Notons tout de même que les IA progressent rapidement, notamment en matière de représentation du monde et qu’elles proposent de plus en plus d’images inclusives.

Dans tous les cas, notre rôle reste le même : comme on choisissait auparavant des modèles d’horizons divers, il nous revient de choisir les images générées par IA les plus ouvertes aux différentes réalités qui existent dans le monde.

Des suppressions d’emploi… pour de nouveaux emplois

L’IA donne l’impression de pouvoir tout faire… Qu’est-ce que cela signifie pour le monde du travail ? Les open spaces seront-ils une nouvelle fois désertés, mais cette fois de manière définitive ? Non. Malgré son nom, l’IA n’est pas intelligente. Bien qu’elle soit rapide et impressionnante dans sa capacité d’analyse, le cerveau humain est encore nécessaire pour adapter, corriger et choisir la bonne création, celle qui correspond à la cible et à l’image de marque qu’il représente.

Oui, l’IA permet de gagner en productivité et certains métiers sont voués à évoluer ou à disparaître. Mais cela signifie également que du contenu pourra être mis à la disposition d’entreprises et de personnes qui ne pouvaient pas y avoir accès auparavant du fait de coûts prohibitifs, par exemple. En déshabillant Pierre, peut-être pourrons-nous habiller Jacques. Enfin, selon Nicolas Hazard, conseiller spécial de la Commission européenne pour l’économie sociale et auteur de Que va-t-on faire de toi ? 85 % des emplois de 2030 n’existent pas encore.

Alors, l’IA, copilote ou usurpateur ? Peut-être juste le nouvel indispensable et inévitable de notre boîte à outil marketing. Reste à nous de l’utiliser de manière responsable.